La marque suédoise Sudio et moi ce n’est plus une découverte. Je fus d’abord bluffé par le très beau design et la qualité sonore des écouteurs intra-auriculaires sans fils Vasa Blå (voir le test), à qui je ne reprochais qu’un manque de maintien pour ma pratique sportive. Ils restent mes écouteurs favoris en déplacement. Le casque sans fil Regent correspondait un peu moins à ce que je recherche mais s’avère être dans l’esprit de la marque, au niveau signature sonore et soin du design (voir le test). J’ai également acheté les écouteurs filaires Klang parce que j’avoue oublier assez souvent de recharger mes écouteurs Bluetooth.
Alors quand j’ai appris la sortie d’écouteurs semi intra-auriculaires, avec des oreillettes adaptées aux mouvements du sport, j’étais plutôt impatient de les tester. J’ai un peu pris mon temps pour écrire cet article parce que ça fait déjà quelques mois que ces écouteurs me suivent; aussi bien à la salle de sport (PPG, renforcement musculaire, cardio pendant une longue période de blessure) que mes sorties running en endurance.
Sommaire :
Mon profil de testeur
Comme toujours, je résume mes exigences personnelles :
Un son qui ne soit pas artificiellement boosté dans les graves et aigus (effet « loudness ») au détriment d’une richesse dans les medium, là où se trouve les timbres musicaux et vocaux.
En corollaire, on doit pouvoir distinguer toute la finesse des instruments à bas volume.
Le système de fixation des oreillettes doit prendre en compte le fait que je suis sujet à des irritations au niveau des oreilles avec la sudation.
La télécommande (play, avance, recul, volume, prise d’appel) doit être pratique quand on court. Bien sur cela suppose l’utilisation d’un lecteur compatible (smartphone, iPhone/IPod). Et cela exclut le couple iPod shuffle-écouteurs Bluetooth, attelage qui nécessite un connecteur additionnel qui empêche la transmission des commandes.
Les éléments sur lesquels je fais la part des choses :
Certains écouteurs sont idéaux pour certains styles et horribles pour d’autres. Ca tombe bien, j’ai une culture musicale qui me permet de ratisser large.
Je ne suis pas vraiment un « jeune ». Et ma pratique du rock à fort volume, comme guitariste ou bassiste, m’a laissé quelques acouphènes qui se traduisent par une hyper sensibilité aux aigus.
Design
Comme tous les écouteurs de la marque, le boitier dans lequel ils sont livrés est très soigné. Il contient, outre les écouteurs eux-mêmes, équipés de leur batterie et de leur boitier de commande à 3 boutons, des embouts, d’une pince pour accrocher les écouteurs à un vêtement et de la désormais classique petite sacoche en cuir pour les ranger. Tout est toujours fait pour en faire un cadeau idéal.
Le modèle que la marque m’a fourni est noir. Ils existent également en rose, bleu et blanc.
Le contenu de la boite désormais classique chez Sudio
Le cable lui même est plat et large, pour diminuer les risques de noeuds. Les boutons de commande sont en aluminium brossé, noirci du plus bel effet.Et ce sont de vrais boutons comparé aux zones en caoutchouc des Vasa Blå.Autre différence, la prise USB pour recharger est désormais sur le boitier de commande et plus la batterie. Cela a surement permis de rééquilibrer les poids de chacune des deux parties. La batterie trop lourde étant un des points négatifs de mon test des Vasa.
Confort et ergonomie
De tous les écouteurs vendus aux sportifs que j’ai essayé, le système des oreillettes qui se place à l’intérieur du pavillon de l’oreille est le seul qui m’aille quand je cours, que ce soit pour le confort ou le maintien. Tout au plus ai-je besoin de choisir une taille d’embout différent sur chacune des oreilles. Ce n’estpas la faute du produit si je suis dissimétrique. Et jusque là, ma référence en la matière était les Monster Intensity que j’utilise depuis 3 ans (voir le test).
Les Sudio Tre ont un système d’oreillette similaire. 3 tailles d’embouts sont fournies. Les différences de taille n’ont à priori pas l’air d’être flagrantes. Mais il faut essayer en situation réelle de course, pour avoir le meilleur compromis entre le confort sur le long terme et le maintien. La matière est habituelle dans ces gammes de prix, un silicone très agréable ne générant aucune irritation à l’usage. Les deux boitiers, commande et batterie, qui bougent forcément, ne sont pas si gênants. Personnellement, je passe le cable derrière la nuque et tout est bien maintenu. Sinon j’utilise la pince en métal fournie, même si elle est un peu difficile à mettre.
Les embouts en 4 tailles pour une adaptation parfaite à l’intérieur du pavillon de l’oreille.
Nous sommes en présence d’écouteurs adaptés à la pratique sportive en extérieur. Donc semi-ouvert et pas complètement intra-auriculaires. Ceci vous permet de garder une capacité d’entendre les éventuels bruits externes: voitures, sonnette de cycliste énervé, ami qui vous appelle … En contrepartie, le niveau sonore ressenti sera, bien sur, moindre qu’avec les Vasa. Mais la forme des embouts est un bon compromis entre enfoncement dans l’oreille et entente externe. C’est le même que sur les Monster. Je n’ai personnellement jamais eu à « pousser » mon iPhone au maximum pour satisfaire mes exigences. Outre la puissance, la qualité habituelle de restitution, fer de lance de la marque, fait son office. Beaucoup de gens croit que pour mieux entendre il faut monter le volume alors qu’il faut juste une meilleure équalisation. Tous les ingénieurs sons vous le confirmeront. Je pense que la signature sonore particulière des Tre, comparée à celle des autres modèles de la marque, a été pensé dans cette optique. C’est flagrant dans mes tests musicaux comparatifs.
Il faut un petit temps d’adaptation pour manipuler les boutons un peu trop lisse et pas assez proéminent au touché. Mais après quelques mois, je n’y fait plus attention. La tenue de la connection Bluetooth n’a posé aucun problème depuis des mois. aucun décrochage intempestif à déplorer sur mon iPhone 6. J’en ai eu quelques uns sur un Android mais je ne suis pas sur que ça ne vienne pas du smartphone un peu bas de gamme.
Autonomie
Avant d’aborder le plus intéressant, le son, il convient de rappeler que qui dit écouteurs sans fil Bluetooth dit batterie et recharge (via un cable USB standard fourni). L’autonomie devient donc un paramètre important. D’autant que, comme dit plus haut, le poids de la batterie peut devenir gênant en course. Le constructeur donne 9 heures en écoute. Je n’ai pas compté exactement. Il faut dire que je n’ai aucun moyen de vérifier la charge restante d’écouteurs. Donc par précaution, je les recharge assez régulièrement. Mais j’ai pu tenir plus de 8 heures de sport dans une semaine sans décharger la batterie. Les 9 heures sont donc tout à fait réalistes.
Son
Le fait que les Vasa Blå, que j’ai encensés, et je persiste, y compris pour du classique, soient des vrais intra-auriculaires quand les Tre sont semi-ouverts, va forcément donner une perception différente du rendu sonore. Mais disons le tout de suite, la qualité Sudio et tout ce que j’aime chez eux est bien là : respect du son, en particulier des mediums, sans sur-gonflage des basses et des aigus, qualité des détails et image spatiale plus que bonne, compte tenu de la taille des membranes dans des écouteurs. Sans oublier que le niveau sonore est plus que satisfaisant.
Bien sur, le ressenti varie selon le type de son que vous écoutez. Passons donc à ma traditionnelle playlist multi-genre.
Pour avoir un repère de comparaison, j’utilise mes Monster Inifinity (filaires), les Jaybird Freedom 2 que je suis également en train de tester et bien sur les Sudio Vasa Blå.
« Wu-Tang Clan Ain’t Nuthing Ta F’ Wit » (rap old school)
Le son Sudio est là même si différent des Vasa. On a un bon équilibre qui ne néglige aucune bande de fréquence et n’en surgonfle aucune. On a quand même une impression que la spatialisation est moins importante que sur les Vasa. Mais ce choix est plus adapté à une écoute en extérieur, pour garder la distinction du détail en environnement bruyant. Rien de gênant donc. Certains pourraient même préférer la précision et le détail que cela apporte. Le son est agréable même à volume plutôt haut. A volume correct, on peut écouter longtemps sans fatigue auditive.
« La Rock 01 » – Vitalic (électronique).
Le kick en 4 temps ”four to the floor” est bien présent pour booster le cardio. On le ressent bien. Là encore, le son est boosté dans les graves et aigus par rapport aux Vasa mais sans trop d’exagération.
« Headline » High Tone (electro-dub)
Ce titre me sert de test d’infra-basse et de ”loudness”. Le style mélange des basses lourdes très ”graves” et des percus très claquantes et pleine d’effet. Les Vasa pêchaient un peu dans ce registre. On distingue mieux les notes de l’infra-basse. Là où on était dans la rondeur reggae et où l’on ressentait plus qu’on entendait la basse,on est, avec les Tre, plus dans l’electro et on distingue bien les notes de basse.
Sans exagérer les basses et les aigus comme sur la plupart des écouteurs de ce type, les Sudio Tre sont bien adaptés aux musiques urbaines et électroniques. La marque semble vouloir clairement répondre à ceux qui trouvaient que les Vasa manquaient de patate sur ces genres, basés sur des basses et des ”kick” de grosse caisse puissant.
Passons au rock à guitare.
« What next to the moon» – AC/DC
Le son est clair, même à faible volume, et on distingue bien les deux guitares en stéréo des frères Young (RIP Malcolm au passage). On a une bonne patate générale dans les mediums. La voix de Bon Scott est agréable, sans aigus criards. Pas rapport aux Vasa, on a moins l’impression de spacialisation. Le son semble plus compact. Ce qui en gros rock à guitare est juste un choix mais n’a rien de gênant au contraire. Il y a cependant moins d’équilibre. Les aigus sont beaucoup plus présents. Ceci dit, je n’ai constaté aucune souffrance en écoute prolongée de rock, malgré mon hyper sensibilité et mes acouphènes.
« Backbone » – Gojira.
Là encore, nous avons un bon niveau de détail et une clarté appréciable. Mes Monster sont largués avec leur côté cotonneux. Le son puissant est agréable et jamais agressif. L’écoute prolongée est possible.Je retrouve quand même le côté un peu moins équilibré que sur les Vasa Bla avec moins de beau medium que ceux-ci. Les Tre ont un peu plus de basse. Finalement les Tre se rapprochent des écouteurs de sport modernes, là où les Vasa voulaient se rapprocher de son naturel haute fidélité. On est quand même loin de l’effet spatialisation et la puissance des basses des Jaybird Freedom 2, par exemple. J’écoute beaucoup de métal pendant mes sorties longues et j’ai beaucoup apprécié les Tre sur ce genre.
OK, donc maintenant passons à l’acoustique :
« Hurt », Johnny Cash.
Je sais que ce genre de chanson n’est pas ce qu’écoutent souvent les sportifs pendant leur entrainement. Il n’y a pas grand chose à dire. Le son est toujours moins ample qu’avec les Vasa ou les Jaybird. Mais on a moins le côté trop propre et finalement ce côté ”roots” plus compact n’est pas désagréable du tout.
« Gogol » – Gonzales (Piano solo / Pub pour une banque).
Le son est nettement moins claquant que sur les Vasa. Il est donc naturellement plus doux et agréable. Parfait pour ce genre de musique.
« Grieg: Peer Gynt Suite – Hall Of The Mountain King » (Herbert Von Karajan – Berlin Philharmonic Orchestra).
Je persiste à tester du classique sur des écouteurs de petites tailles faits pour le sport. que voulez-vous, on ne se refait pas. Les Vasa Blå ont été les premiers intra-auriculiaires avec lesquels je supporte d’écouter un orchestre classique. Je ne pouvais pas ne pas tester les Tre sur le sujet. avec un titre jouant sur des nuances de dynamiques montant crescendo jusqu’à un ”climax” d’un puissance rare, que l’on trouve plutôt dans le rock.. Bon ici le manque de spatialisation donne l’impression que tout est ramassé. Le son n’est pas désagréable. Un peu étouffé parfois. Mais on est moins dans ce sentiment d’être dans la salle de concert.
Note : Si vous voulez écouter les titres cités dans ce test, je vous les ai mis dans playlist sur Deezer : cliquer ici.
Sans être taillé spécifiquement pour un genre musical particulier, les Sudio Tre s’en tirent bien partout, avec un bon équilibre entre le positionnement de Sudio sur les précédents modèles et la demande en basse de notre jeunesse. Bien sur, j’ai testé en intérieur au calme. Quand je cours, je suis moins exigeant.
En conclusion
Vous aurez compris, je suis fan. C’est exactement ce que j’attendais de Sudio depuis le jour où j’ai testé des écouteurs de cette marque. Avec les Tre, le côté semi-ouvert fait que je n’ai pas l’immersion et le son naturel des Vasa Blå, qui restent mes écouteurs préférés quand je ne fais pas de sport. Mais ils sont largement au niveau de mes attentes en terme de qualité du son. Qui plus est sur des sorties longues.
Je les utilise pour tous styles de musique ou pour mes livres audio, dans des environnements bruyants, aussi bien la salle de sport que dehors. Ils ont mis mes fidèles Monster à la retraite. Si, comme moi, vous aimez les beaux sons équilibrés, nous avons là un produit haut de gamme parfaitement adapté à l’écoute en mouvement et à l’extérieur.
Ce sont définitivement mes écouteurs de sport préférés.
A 89€, on est dans un prix plus que correct pour du Bluetooth dans cette gamme. Sans compter le code promo « endomorfun15 » qui vous fait gagner 15%.
Les plus
Comme toujours chez Sudio, la qualité du son le plus naturel possible. Même si ici, les basses gagnent en puissance.
Le confort et le bon maintien des oreillettes.
Le design qui fait bijou, du boitier aux accessoires, avec une mention pour la pochette en cuir, qui en font un cadeau parfait.
L’autonomie de 9 heures avant recharge.
La commande complète (avec prise d’appel téléphonique)
Le site de la marque qui vous propose le paquet cadeau gratuitement.
La pochette en cuir jolie et pratique.
Les moins
Pas de mode veille automatique quand il ne détecte pas de signal. Attention à ne pas oublier de les éteindre.
Sur le casque Regent, il y avait la possibilité de brancher un cable mini-jack pour le transformer en « filiaire » en cas de décharge de la batterie. Je conçois que ça soit plus difficile de faire ça, sans gréver le poids sensible, sur des écouteurs. Mais j’avais trouvé l’idée excellente, vu le nombre de fois où je me suis retrouvé en panne au milieu d’une sortie longue avec toute sorte d’écouteurs Bluetooth.
Pas les plus légers, malgré des efforts par rapports aux modèles précédents. Mais rien de gênant en course à pied.
Vous pouvez trouver les Sudio Tre directement sur le site de SUDIO. Ils expédient dans le monde entier. Vous pouvez bénéficier de 15% de remise sur tout le site avec le code promo « endomorfun15 ».
Je n’avais pas vraiment prévu, après les livres, de faire un chronique cinéma sur ce blog. Mais, après tout, le running est une culture à part entière qui a sa littérature, ses spectacles, son art graphique et bien sur son cinéma.
Point de remake hollywoodien des « Chariots de feu » pour ce billet, je vais vous parler d’un documentaire. Encore un documentaire sur la course à pied ? Oui, enfin, attendez. D’abord le réalisateur, Pierre Morath, est un ancien athlète de haut niveau en fond et demi-fond, devenu coach, diplômé d’Histoire du sport et cinéaste. Autant dire qu’il est là à la rencontre de ses deux grandes passions et qu’il va savoir de quoi il parle et comment bien en parler. Et c’est un euphémisme.
« Free to run » parle de course à pied et de liberté. Vous ne vous y attendiez pas à celle là n’est-ce pas ? Et l’association des deux n’est pas juste une figure de style ou un slogan marketing. Et ça je n’en avais pas autant conscience avant de voir ce film d’1h40.
On connait tous, sinon le nom au moins l’histoire de Kathrine SWITZER, qui a osé, en 1967, courir le Marathon de Boston, alors interdit aux femmes. Le film fait une grande part au combat des femmes et il ne s’arrête absolument pas à l’hitoire de Kathrine puisque le premier marathon féminin au J.O. ne s’est couru qu’en 1984.
Depuis la marginalité des premiers runners hors stade, ces pervers presque nus qui courent dans la rue, jusqu’aux dizaines de milliers de participants au Marathon de New York, le film retrace l’épopée, des années 60 à nos jours, de ces rebelles qui ne voulaient que la liberté de courir. De l’Oregon du grand Steve Prefontaine à la Lozère du mythique Marvejols-Mende, en passant par le magazine culte Spiridon, des héros épiques ont créé quelque chose qui dépasse l’athlétisme millénaire.
Steve Prefontaine,1973, Hayward Field, University of Oregon. (Wayne Eastburn/The Register-Guard)
On est littéralement scotché à leur histoire, images belles, dures et émouvantes aux larmes à l’appui. Sans complaisance sur les point noirs, l’auto-satisfaction en mode bisounours n’est pas dans le scénario. Ce film est fort, très fort. Je ne saurais dire s’il ferait le même effet sur quelqu’un qui se demande pourquoi l’on court.
Il y a des incontournables culturels, pour tous ceux pour qui courir est autre chose que le jogging dominical pour se maintenir en forme. Comme le passionnant livre « born to run », dans un tout autre genre, ce film en fait définitivement partie de mon point de vue. Il modifie profondément la perception de cet acte si simple, en le remettant dans un contexte sociétal et historique de premier plan.
Quelques reproches à faire : tout d’abord, ce film donne une irrémédiable envie de courir le Marathon de New York. Ensuite, on se reproche de n’avoir pas connu ces époques pionnières. On trouve le monde du running actuel, le notre, un peu trop futile et consumériste en sortant de la projection. J’ai couru Marvejols-Mende mais je ne connaissais pas l’histoire admirable de cette course. Bref, je reproche à ce film de ne sortir que maintenant et de donner encore plus envie de courir.
Je salue au passage, un guest sur les images du Marathon de New York, Jean-Pierre Run Run, bloggueur runnosphérien bien connu, équipé de sa GoPro. D’ailleurs, je me demande dans quelle mesure je ne lui dois pas l’invitation à cette projection presse (donc grand Merci si c’est le cas).
Sortie le 13 Avril. Courez-y !!! (je ne pouvais pas la louper celle-là).
Je suis donc une fashion victim. J’ai succombé à une mode qui sera surement , comme toute mode, passagère. Celle de me mettre à la course à pied. Le running. A ne pas confondre avec le jogging des années 80. Le running ça veut dire que non seulement je vais courir plusieurs fois par semaine mais en plus, je m’inscris à des vrais courses. Avec plein de gens comme moi qui se répètent sans arrêt « ah si mon prof de gym de collège me voyait », « ah putain, dire que je détestais le cross de fin d’année en primaire», ou la version « j’suis trop un aventurier, je fais le Marathon des Sables » : « c’était bien la peine de me faire réformer pour éviter les marches commando de 100 km, maintenant je paie une fortune pour faire pareil».
Parce que la mode du running a cela d’énervant qu’elle ne touche que des gens qui détestaient le sport avant. Et toi qui n’aime toujours pas le sport, tu vois tes amis devenir franchement lourds avec ça.
Un matin, je me suis révéillé en disant : « ouah c’est cool de cramer plein de fric à s’habiller en fluo, je vais donc me lancer dans la course à pied ». C’est fun et hype. OK, je ne peux pas courir plus de 20 mn sans point de côté mais avec une tonne de magazines, dont beaucoup n’existaient pas il y a 2 ans, 3 tonnes de blogs super pertinents et surtout 300 applications sur mon iPhone, dans deux ans je suis marathonien. Le graal du runner. Enfin, celui qui ne succombe pas à une autre sous-mode du running, le trail.
C’est encore pire là, le trail. Attention je parle de celui que l’on prononce à l’américaine, le « Twèiiillle ». Pas le « traille » des péquenauds qui courent depuis des lustres dans la montagne. Pas non plus la course en montagne. Faut pas confondre. Nous on a rien à voir avec la poussiéreuse FFA, nous on est des purs, des enfants d’Anton Krupicka et de Killian Jornet. D’ailleurs j’ai un Buff. Ouais le foulard. Le vrai hein, le jaune celui avec écrit « Buff » en énorme comme Anton.
Le « twail » c’est pire que le running. C’est LE sport ultime pour le quadra bobo CSP+ parisien. Il s’achète des pompes à 170 euros, avec des crampons dignes d’un pneu de VTT et va se triper au Parc de St Cloud, en pensant à son prochain voyage à la Réunion ou à Chamonix, les mecques du « twaileur ». Après, ils débarquent en province, se faire déposer dans la première descente par une mamie véteran 3 qui est née dans le coin, mais ce n’est pas grave. Respect. Pure (« Pioure »). Mon seul adversaire, c’est moi-même.
Et puis, il ne faut rien négliger pour être vraiment dans le move : j’ai une montre GPS/Cardio/coach/réveil matin/nounou à 500 euros, 6 paires de pompes pour mes différents types d’entrainement ou la météo et surtout un coach qui me coute le prix d’un abonnement au Club Med Gym, celui avec l’option serviette. Sauf que moi, t’as bien compris, je suis plus dans l’outdoor. Dans mon club, on a même pas de douche et de hammam. Même quand il pleut, on va faire du fractionné. Tu crois que le jour où je vais faire la Diag’, il fera forcément soleil ? La Diag’ ouais. La Diagonale des fous. Le rêve ultime d’aller se bouffer 170 bornes et 10 000m de D+, ouais, le dénivelé positif. À la Réunion. Le Grand Raid. De toute façon, j’ai une veste superlight respirante étanche, homologuée UTMB. Quoi un K-way ? T’es malade, ça m’a couté un demi-RSA.
Et puis, comble de la fashionista du sport, j’ai même un blog où je raconte ma vie et je teste du matos tel l’expert que je suis au bout de 2 ans à fréquenter le circuit des pasta parties. J’ai même couru un footing dans Paris avec Nathalie Mauclair, un jour. Et j’ai été coaché par Dominique Chauvelier. Bah, si t’étais runner, tu saurais qui c’est.
Un matin, je me suis donc réveillé « runner ». A 45 ans. Je fumais comme un pompier depuis 22 ans, je pesais plus de 100 kg pour 1m76. Je me suis juste dit « OK à ce rythme là, je vais crever dans moins de 10 ans mais là tout de suite, le plus important c’est de suivre cette mode sympatoche et fluo. Allez dans 6 mois, on passe à autre chose ».
Comme j’avais succombé à la mode du tabac mais qu’elle devenait un peu has been, j’ai arrêté de fumer. La mode d’être gros, c’était pire. Rester gros faisait de moi un hipster fan de vintage. Il était temps de prendre conscience que la mode avait changé. Maintenant la mode c’était d’être mince et sportif. Et fluo. Ben, s’il n’y a que ça, je m’y mets alors. Y’a qu’à ..
Le problème, quand on n’aime pas le sport, c’est qu’on a tendance à fréquenter essentiellement des gens qui n’aiment pas non plus le sport. Et quand on est un cadre sup parisien, donc forcément un bobo quelque part, on va fréquenter des gens qui n’aiment pas trop les modes, le mainstream. Ce sont les premiers à dire ou penser fortement (aka « écrire dans des commentaires sur Facebook ») : « tu nous gonfles avec ta mode du running, vivement que ça te passe ».
J’ai déjà entendu ça …attend voir. Ah mais bien sur « Tu nous gonfles avec ta guitare, vivement que tu passes à autre chose !!!». C’était il y a 33 ans. Je joue encore dans deux groupes de rock à 48 ans. J’ai pas du tout comprendre au fonctionnement des modes.
Les gens qui me connaissent savent combien j’aime bien faire chier mes amis. Désolé, je n’ai pas trouvé formule plus juste. Donc il est clair que je me suis mis à courir UNIQUEMENT pour les faire chier sur Facebook. On va dire qu’avoir totalement changé mon hygiène de vie est un effet de bord, un dommage collatéral. Et puis d’ailleurs, même étaler ça participe du « tu fais chier ». Tu sais les photos « avant-après » pour parler de quelqu’un qui a perdu du poids. Pour tout le monde c’est toujours bidon. Du photoshop. Mais tes potes, ils l’ont vu en live chez toi et ça énerve. Les plus faibles d’esprit se mettent à t’imiter, à courir. Arf, les victimes de la mode.
Et il n’y a pas que sur Facebook. Je ne parle pas des fois où je dis « désolé, je suis en prépa d’une course de 72 km qui va durer toute la nuit, alors pas d’alcool et de plat en sauce pour moi ». Relou même IRL, les runners. Du coup, j’ai de nouveaux amis. Beaucoup. Des runners. Ils sont sympas. Ouais, même les parisiens. Et puis on fait quand même des gros apéros. Attend, avec toutes les calories qu’on crame ..c’est pas un verre de côte de Blaye .. et puis le champion d’ultra-trail est vigneron, alors … Et ouais. Du moment qu’on picole bio.
Je sais, j’étais le premier à trouver les sportifs chiants en société. Presque autant que les musiciens ou tout autres geeks passionnés mais eux, en plus, attirent les regards. Je n’ai d’ailleurs pas beaucoup changé d’avis. Je ne suis pas un sportif, je suis une fashion victim du running. Rien, mais alors rien à voir.
Le sport c’est les Jeux Olympiques, le sas élite des marathons, le demi-fond, le cross du collège, l’UFOLEP, la FFA, le fric du Qatar, le dopage et les kenyans tout maigres … Moi je suis là pour la convivialité et pour étaler mes godasses fluos et mes fringues moulantes de super héros d’opérette. Et puis, je suis surtout un « twaileur » donc je recherche la communion avec la nature, « born to run, tu l’as lu ? non ? tu peux pas comprendre ». Le running c’est « pure », une paire de chaussures, un short, c’est tout.
J’abandonne le gluten et le lactose aussi. Je sais c’est la mode. J’ai une amie qui est intolérante au gluten. La chance, elle a une excuse pour être à la mode. Là je lis la bio de Scott Jurek, un ultra-traileur vegan trop cool. Sinon j’ai songé au Paléo aussi. Ouais manger comme les hommes préhistoriques. Pure. La nutrition c’est important quand on prépare l’UTMB de dans 5 ans. C’est bon pour la santé ? Ah bon, tu crois. J’en sais rien, je ne fais ça que pour rentrer dans la panoplie, tu penses bien. Ben ouais, mec, la mode du running ça ne s’improvise pas. Tu dois non seulement t’équiper mais aussi bouffer, boire, lire et dormir running. J’ai programmé ma montre Suunto pour contrôler mon sommeil. « Désolé, je te suis pas en boite de nuit, j’ai un plan à respecter. Dans 12 semaines, je me tape la plus grosse bière du monde mais d’ici là, appelle moi Chaussé aux moines ».
Scott Jurek, l’auteur en séance d’autographe
T’as vu le dernier film de Kilian ? non ? tu peux pas comprendre. Le gars il se lève à 5 du mat’, il se bouffe le Mont-Blanc aller-retour depuis Cham’ et il est à l’heure pour le déjeuner de midi. Sur qu’il se tape pas un couscous-Boulaouane au ptit dej.
Le running c’est une vraie culture. On a des écrivains et des philosophes qui ont écrit dessus. Attends, hey, on a même un humoriste « twaileur », Yohann Metay. J’ai vu son spectacle dans un petit théatre, à Paris. C’était cool. Y’avait que des twaileurs dans la salle. Y’avait même Cécile Bertin. Tu connais pas Cécile Bertin ? Mais non elle n’a jamais gagné au JO. T’as rien compris, c’est pas ça le truc. Cécile c’est une pure, elle ne fait que des trucs de malade, sans entrainement, rien, juste une peu de pédicure et elle part au pôle sud ou en jesaispastropkoigonie courir pendant 6 jours, sans se laver. On s’en fout des JO.
Bon allez si, j’avoue, j’ai regardé la finale du 5000 m au championnat du monde d’athlétisme. Ouais du demi-fond. Si si, 5000 m pour les Runners c’est du demi-fond, nous on ne discute qu’à partir de 10K. Mais je voulais analyser la foulée de Mo Farah dans les ralentis. Je t’ai dit, ça ne s’improvise pas. C’est pour en discuter avec mon coach. Le passage cycle avant – cycle arrière tout ça. C’était beau.
C’est comme à Suzanne. Oui le stade Suzanne Lenglen à Issy-les-Moulineaux. Tu crois que les mecs au bord de la piste ils matent les filles en trucs moulant mais en fait non. Y’a des « avions de chasse » qui s’entrainent. On admire leur foulée. On dit pas « elle est bonnasse la petite blonde » mais « ouah, t’as vu comme elle est affutée, la canadienne».
Je suis trop une fashion victim. Je trouve même Kalenji mega cool. Ouais, ouais Decathlon. Ben ouais ils ont fait des progrès depuis qu’ils ont pris Thierry Breuil, un ex champion de trail, comme chef de produit. Non, c’est pas juste un sponsor. On est pas dans le foot. Thierry, il a mis son âme de « pure » dans ses pompes et ses fringues. Tu le ressens dans le drop du déroulé de l’amorti. C’est important, quand tu cours pendant 8h d’affilée dans le minéral, de garder le confort du chaussant sans sacrifier le dynamisme. Même quand tu es sur-pronateur.
Je peux te conseiller un bouquin si tu veux.
J’en ai un top. Il y a même un catalogue des blessures. Ouais, je suis au top quand je vais chez mon kiné. J’ai tout eu en seulement 2 ans. La classe non ? TFL de l’essuie-glace du syndrome rotulien, périostite de la tendinopathie pubalgique, aponévrosite du tendon d’Achille de Morton … A chaque repas de runners, quand arrive le moment de raconter ses blessures, je suis prêt. Ouais, bon, là j’ai une petite entorse. On fait ce qu’on peut. Maudite racine dans le massif des 3 pignons. Faut dire que j’ai un peu trop succombé à la mode de l’oversize. J’abandonne les Hoka One One, je passe chez Altra Zero Drop. L’amorti ça empêche de ressentir le terrain. C’est pas pure.
Pour les blessures, c’est pas grave j’ai un Compex. Ouais le wireless à 1200 boules. Ben ouais, la récup’ ça ne s’improvise pas. Un massage à l’arnica, mes chaussettes de contention scientifiquement prouvées, un coup de gégène sur les quads et hop … le lendemain, aucune courbature.
Bref, c’est dur de rester au top de cette mode mais je tiens depuis 3 ans maintenant. Là je prépare les Templiers. C’était le premier « twail » en France. Un vrai comme les américains. Oui, je fais les classiques. Obligé. J’ai fait la Saintélyon. Un truc à la mode : tu te pèle le jonc toute la nuit a courir 70 bornes entre St. Etienne et Lyon. T’es déjà allé à St.Etienne toi ? Moi non plus. C’était la soixantième année mais bon, avant c’était pour quelques péquenauds un peu barges, maintenant c’est l’évènement immanquable pour un twaileur. Je dors avec mon t-shirt de finisher.
Ah tiens, le blog jetenculetherese.net a fait un article trop marrant où il se fout des runners. Ouais, il a trop raison, les color run et les courses à obstacles dans la boue c’est bidon. C’est pas « pure ». Et puis, les partages Runtastic sur Facebook, j’ai arrêté. Au moins sur Strava on est entre runners. C’est pas juste pour l’ego, c’est pour partager le ressenti et aider les autres. C’est important d’entretenir la solidarité.
Ouais, t’as vu, j’ai abandonné le cynisme de bistrot et la pseudo-misanthropie sur la ligne de départ de mon premier 20 km de Paris. Pourtant c’est toujours un peu à la mode ça non ?
Bah, je peux pas tout faire aussi.
Donc là, je suis limite bisounours.
Tu sais que dans un twail, si tu n’aides pas un coureur en difficulté, tu peux te faire disqualifier. C’est l’esprit twail. Ca a changé ma perception des humains. Non, t’inquiète, j’ai pas encore viré zen mystique. J’ai arrêté le yoga parce que j’avais plus le temps avec mon programme de cross-training.
Bref, la course à pied … Si si la course à pied, c’est mieux que de dire « jogging » même si t’es pas québécois. Quand je dis que la course à pied a totalement changé, voir a sauvé, ma vie, je ne suis qu’une fashion victim un peu relou ? Ca me passera, tu crois ? Bon, si tu le dis. Je te laisse, je dois aller tester mes nouvelles Saucony Xodus fluos. Cool, il pleut.
NOTE : Comme il m’a fait l’honneur de passer lire cet article, je me permet de rappeler que, pour ceux qui aiment l’auto-dérision et les « twaileurs », je ne saurais trop vous recommander le spectacle de Yohann Metay, qui repasse à Paris en octobre.
Edit : Le comble pour quelqu’un qui vient d’écrire un tel article ? Se faire filmer à l’insu de son plein gré avec sa femme en train de faire son footing et passer dans une émission dont le sujet est « La Folie du running ». Arf, piégé 🙂
Emission « La Quotidienne » du 4/09/2015 – France 5
Pour quelqu’un qui, petit, était trop gros, trop lent, trop tout ce qu’il ne faut pas pour avoir ne serait-ce que son nom dans le palmarès du Cross de l’Ecole, ma collection de médaille depuis plus de deux ans est déjà une revanche de la vie.
Mais il manquait la « photo dans le journal ». Grâce à Joggeur, magazine que l’on aime vraiment (on est abonné) parce que l’on partage cette vision moderne et décomplexée de la course à pied, c’est chose faite.
On a beau être blogger, à fond dans la culture numérique, y compris professionnellement, ça fait toujours plaisir. Surtout que le contact avec Olivier Pernot le rédac’ chef a été très sympa.
Pour Noël, nous nous sommes offerts un petit cadeau : un logo tout neuf.
Nous avons travaillé, cette fois, avec un vrai graphiste. Nous voulions quelque chose de fun bien sur, qui rappelait le côté rock’n’roll sans ressembler à un logo de groupe et qui évoquait l’endurance et les trucs de geeks. Il nous a proposé ça parmi les premières pistes. Nous avons essayé plein de concepts sur la base d’un pictogramme comme « O » de endOmorfun. Mais nous sommes revenu au petit chrono. Pas parce que nous sommes obsédés par nos chronos mais parce qu’il évoque les montres, ultime objet geek du sportif d’endurance, le cardio et aussi une forme d’onde sonore donc la musique.
Personnellement, j’aime bien le côté « radio FM rock » de notre logo. Et vous ?
Du coup, je me permets de faire de la pub à ce graphiste belge très sympa et vraiment pro : PhoenixITM
Je profite de la publication, (enfin !!!) de nos images de la Saintélyon pour inaugurer avec vous ce prémice de nouvelle image graphique du blog. 2015 verra surement d’autres modifications. Et une utilisation sympa de ce logo (qui a dit goodies ?).
Pour ce qui est du film, je n’avais pas vraiment toujours la tête à allumer la GoPro. J’ai fait ce que j’ai pu avec les quelques images prises pour vous relater l’ambiance dans un peloton d’apprentis Saintélyonistes.
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