[Récit & vidéo] Notre première Saintélyon – la version d’Anne-Claire
(photo ©Flash-Sport)
Chers amis,
Je commencerai ce CR par vous raconter l’histoire de Loulou le gros chaton sauvage qui, non content d’avoir coaché comme un chef ma récup durant ces 3 mois de préparations Saintélyon, à coup de ronrons magistraux et d’étirements d’envergues, décide de choper une indigestion massive à la veille de notre départ pour Lyon. JOIIIIIE.
Je troque donc au matin ma séance tant attendue chez le coiffeur contre un rdv en urgence chez le vétérinaire, un imprévu qui me ravit au plus haut point, comme vous pouvez l’imaginer. Tension palpable chez les Birot.
Voiture, hurlements, piqûre, traitement, blancs de poulet préparés avec amour. Les valises sont bouclées, les voisins prévenus et d’accord pour assurer la surveillance. Il est 17h, nous quittons Paris, Jean-Guillaume, Claire, ma coupe Chateaubriand et moi.
TOUT VA BIEN (j’suis borderliiiiiiiiiiiiiiiiiiiine).
VENI
Dépose de Claire à son hôtel, 5h plus tard, récupération de la chambre, grasse matinée, petit dej’ à volonté, douche. Ayé, nous sommes le 6 décembre, et il est déjà midi, donc l’heure de rendre la chambre, rejoindre le parc de Gerland pour la récupération des dossards, retrouver les copains d’Urban Running, acheter le ticket pour la navette, faire une pause déjeuner au Japonais du coin. Puis c’est l’aller-posage-retour à l’hôtel de Claire, la sieste dans le bus vers Saint Etienne. Et hop, 20h30 dans ta face.
Autant vous dire que je ne pense désormais plus trop à mon chat (qui va très bien qui plus est, d’après les sms de ma sentinelle).
Pasta Party avec la fine équipe au complet, re-posage, préparation et glandage dans le hangar géant en attendant le départ. J’ai mal au crane, et impossible de dormir dans cette ambiance bizarre. Je stresse, mais moins qu’en Islande. L’effet de groupe, sans doute. L’impression dominante ressemble plus à un flottement dans une bulle irréelle qu’à une crise de panique. Un doliprane et il est temps.
23h30, les sas se constituent, chacun se place. Instant selfie, sautillage sur AC/DC pour se tenir chaud, ajustement de la frontale : c’est parti !
VIDI
Et ça démarre assez fort, niveau allure. Un peu rapide pour moi ! Les 8 premières bornes sont par ailleurs absolument sans intérêt. Mais l’ambiance est là, les bagnoles klaxonnent, il y a une grosse euphorie, puis viennent bientôt les premiers chemins – enfin ! – et la boue. Le premier ravitaillement est rapidement atteint. Je comprends très vite que je ne pourrais pas suivre le rythme, ni d’Estelle et Richard, ni de Jean-Guillaume. Je mets quelques bornes à accepter cette évidence et me conditionne à faire la course toute seule. J’imagine le massacre si le temps était plus froid, et la route pleine de verglas. De quoi vous faire aimer la boue, en fait !
Mes chevilles sont en feu, je ne sais pas pourquoi, je n’ai jamais ce type de douleur d’habitude, et en plus j’ai dû me froisser un petit muscle fourbe au niveau de la cheville, qui me tire à chaque foulée. Une douleur bien pénible sur laquelle je vais focaliser pendant plusieurs kilomètres, jusqu’à commencer même, à envisager un abandon. Et en plus j’ai des débuts de crampes, SU-PER.
Je suis Jean-Guillaume tant bien que mal dans les montées, jette un œil derrière de temps à autres pour admirer au loin le filet magique de loupiotes. C’est beau ! Je n’en reviens quand même pas d’être là, ni de faire ce que je suis en train de faire. Je ne regrette pas de m’être embarquée dans ce truc un peu fou, malgré les éclairs de lucidité qui me traversent. Je suis quand même en panique, et il me faut de la musique tout de suite pour anesthésier mes pensées. Je n’ai même pas vérifié si mon ipod shuffle tout neuf fonctionne, ni mes playlists. Peu importe, j’ai définitivement perdu Jean-Guillaume, il me faut du son !
L’apaisement est quasi instantané, je n’en attendais pas autant, et mène d’un coup mon petit bonhomme de chemin tranquillou, sans pression. J’ai mal, mais je m’en fous. Je vais tenir encore un peu, ça va peut-être passer, avec les endorphines, tout ça…
Je retrouve Jean-Guillaume complètement par hasard juste avant le second ravito, trop contente !! Me voilà doublement apaisée, et pour ne pas changer, j’entends dans ma tête cette phrase mythique de la cité de la peur : « il ne peut plus rien, nous arriver d’affreuuuux, maintenaaaaant ».
Je m’abstiendrais sur le passage des ravitos, je pense que vous l’avez tous compris : C’EST LE BORDEL ! On essaye de ne pas s’attarder mais c’est dur, on…je resterais bien au chaud. Mais non ! Un bout de banane et ça repart.
La troisième portion est décisive. Et 38 kilomètres plus tard, nous allons atteindre le 3e ravito, et mon petit nerf fourbe est toujours là. C’est donc ici que je dois décider si je continue ou non. PRESSION PRESSION ! Nous croisons Yann, un acolyte d’Urban. Le pauvre est complètement lessivé, dépité. Et je réalise que je suis loin d’être dans cet état. Je vais donc pousser jusqu’au prochain ravito. Du moins essayer. Lol. N’importe quoi, tu sais que tu pars pour finir, n’est-ce pas ?
Nous continuons à deux, on ne se perd plus. Il fait froid. Nous prenons quelques flocons très fins, pas assez épais pour pourrir mes lunettes, dieu merci ! Globalement la météo est clémente, et je n’arrête pas de me dire que ma bonne étoile veille, une fois de plus. Ma montre vibre et indique 42 km. Wahou, un marathon, même plus, et je suis encore fraiche. C’est beau l’auto-persuasion ! Car en réalité, je suis dans le dur, grave ! Et pourtant très calme, toujours avec ma « pop molle » en fond sonore. Même mon nerf fourbe s’est endormi. Je suis dans le dur, pourtant je n’ai, pour une fois aucune pensée toxique. Pas de fantômes qui m’étouffent, juste des airs imaginaires pour me pousser.
VICI
Avant dernier ravito. Il reste 25 bornes. Il doit être 7h du mat environ, et je commence à être raide défoncée. C’est l’heure du snickers ! Pas question de s’arrêter là, dussè-je atteindre Lyon en rampant ! J’ai mal partout, certes. Mais Jean-Guillaume aussi, ce qui me rassure d’un coup sur son humanité 😉 Quelques étirements et ça repart, encore !
8h. Le jour se lève. Je l’attends depuis plusieurs bornes déjà. La fatigue me rend ce moment très émouvant. Je dors debout, littéralement. Je pique du nez, il me faut me concentrer pour rester éveillée. Il fait toujours froid. Nous courrons sur beaucoup plus de bitume maintenant, et cela fait du bien, je suis obligée de le dire.
La montre vibre : 56 km. Ma vieille, tu viens de battre ton record Islandais en termes de distance. Et tu vas tranquillement, douloureusement aussi, vers l’arrivée.
Jean-Guillaume souffre, autant que moi des jambes, et en plus des intestins. Je trotte derrière lui et observe avec admiration son éternelle détermination, avec l’impression que nous pourrions nous suivre jusqu’au bout du monde. Je commence moi aussi à sentir le trop plein de sucre dans mon foie. Vivement l’arrivée !
Dernier ravito, mes jambes hurlent. Il reste 12 bornes, alors on s’étire et on repart, tant bien que mal. Mon shuffle vient de boucler, tant pis, je repars pour un tour, cela ne me dérange pas, je suis suffisamment fatiguée pour n’en avoir rien à faire. La musique continue de faire son job et m’occupe la tête, je fredonne même des bouts de chansons. Je me concentre sur le paysage, qui est beau malgré tout, mais aussi sur les messages laissés à terre, ou sur des pancartes. Des gens nous encouragent, applaudissent, hurlent. Ça fait du bien ! J’AI MAL ! Nous marchons, beaucoup, tout le monde ! Surtout dans la dernière côté, la terrible, dans laquelle je perds Jean-Guillaume (ou plutôt Jean-Guillaume me perd).
5 bornes. Tu vas pas les faire en marchant ma grande, ça suffit ! J’en ai marre, qu’on en finisse, je veux une douche, de la chaleur, une couette, je veux m’effondrer et DORMIR. Alors je cours. Je rattrape Jean-Guillaume dans une série d’escalier (REALLY LES MECS ?????), en descente. Puis bientôt il faut en remonter une nouvelle série, et redescendre à nouveau. Je vais mourir.
2 km. On marche/court/marche/court/marche. C’EST LONG !!!!
1 km.
500 METRES ! GoPro, mains, sourires, émotion, arche, arrivée, bisous, sanglots.
La suite ? Des retrouvailles avec les copains, des larmes (beaucoup !), de la douleur (encore plus), une douche bouillante, un blanc de poulet bien mérité, une bière aussi, un lit, UN LIT !!!! Vers 20h, une entrecôte délicieuse aves des frites, puis de nouveau le lit. Un petit déj’ princier en bonne compagnie, et bientôt le retour en voiture, avec arrêt resto en bonne compagnie, again.
A J+7 right now, comptez également un coup de pompe magistral, avec un rhume/simili-bronchite bien installé(e), et un corps complètement déglingué : sautes d’humeur, cycle décalé, digestion capricieuse, absence totale d’énergie et un peu de déprime. A part ça, mes jambes vont bien.
Pas prête pour le marathon des sables, mais « opé » pour celui de Rome.
A l’année prochaine ! Ou pas ;))
Si vous l’avez ratée, la version de Jean-Guillaume est ici.
Comme on ne se lasse pas de lire des récits de cette aventure, je vous mets ceux des coureurs que l’on connait :
– Bon il aura mis 2 semaines à écrire son récit, avec une très mauvaise excuse d’un déménagement, alors qu’on l’a vu faire le 10km de la Corrida d’Issy, une semaine à peine après la Saintélyon, en 38mn. Mais voilà, le premier de la liste, c’est l’incroyable Greg Runner Sainté d’or en 7h26. Entre les 100 km de Millau et sa Saintélyon, il doit être fier de son année et il y a de quoi.
– Vincent Gaudin qui prenait une revanche sur 2013 et fait l’apologie de cette course en duo. Bien sur nous sommes plus que d’accord.
– Julien le Mangeur de cailloux qui râte son objectif de Sainté d’or (moins de 7h45) mais est quand même à 8h01. Oui 1 mn du sub-8h, je crois que ça doit énerver quelque part. Mais il reste un de ceux qui nous ont donné les meilleurs conseils pour cette première (en particulier le réglage de la Petzl Nao) et on regrette encore de ne pas avoir participé à sa Saturday Night Frontale, 2 semaines avant.
– Le blog de Thomas, dont Jean-Guillaume parle dans son récit. Un récit très très détaillé tant au niveau stratégie de course que réalisation.
– Le toujours excellent et funky Daddy the Beat qui, pour le coup, a plutôt fait sa première Sainté en mode émotion. C’est ça la course à pied.
– Les Lapins Runners, des modèles. Ils courent tout en couple. Ils avaient râté le finish en duo l’année dernière, ils sont revenus prendre leur revanche. Tout ça après une année de défis un peu fous, enchainement de marathons et petite ballade dans le désert (Marathons des Sables).
– Et puis, la Saintélyon ce n’est pas que des belles images de finishers. Alors une pensée pour Philippe du blog Jahom, qui pouvait lui aussi espérer la Sainté d’or mais qui a été contraint d’abandonner.
Et notre vidéo :
Et celle de notre amie Mathilde sur la Saintésprint et à l’arrivée de tous les potes
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il ne peut plus rien, nous arriver d’affreuuuux, maintenaaaaant 🙂
Entre les « il dit qu’il n’a plus de genou » et les « tandis que revoilà la sous-préfète », Anne-Claire a un peu tendance à tout citédelapeuriser en course.Quant aux gamins qui attendaient leur père à quelques mètres de l’arrivée et qui ont failli gâcher notre photo de finish, ils ont échappé de peu au « Barrez-vous cons de mimes ».
Hmmm, ce bon bain m’a fait du bien ! ;)))
Bravo championne. J’aime bien ce petit ton « non mais ca va pas la tête » et finalement tu fais toutes ces courses à la con, en serrant les dents, mais avec une petite pointe de plaisir. Continues comme ça!
Ouais ben j’arrive toujours pas à la motiver pour le Marathon des Sables.
Non mais là tu peux te lever tôt chéri 😀
Quand ils feront le marathon des sables, je te propose d’aller tester les chemins de trail de Corse !
Figure toi que j’ai bien discuté avec les organisateurs de la Restonica au village de la STL. En goutant leur fromage et leur charcut’ de la mort (ça les corses, il savent au moins faire ça). Ça m’a titillé cette course mais bon, c’est en juillet. Autant dire hors de prix pour y aller. D’ailleurs quand le gars m’a dit « Faites gaffe, nous les corses on est pas commode », je lui ai dis « ça va, nous on a un coach corse ». Réaction du gars, avec le vrai accent comme dans Asterix, « Alors ça va ».
Bravo Anne-Claire! La Sainté, ca fait mal, mais ca fait du bien! Et ca permet de retrouver la sensation de bonheurs simples comme une bonne douche, une couette et un bon steack fites!! 😀
Bravo pour cette longue course, car tu as super bien géré!
oh la la, -M-erci pour le clin d’oeil… si on m’avait dit y a 10 piges qu’on serait en train de parler d’une course à pied de 72 bornes la nuit, j’aurais dit faut arrêter tout d’suite les champi !
Et mille bravos pour ce bel accomplissement !
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