CR : ma (trop petite) Saintélyon en relais à 4
Ah la mythique Saintélyon !!! 60ème édition de celle qui est, parait-il, la doyenne des courses nature. Cette année, le parcours de St-Etienne à Lyon fera 75km. Je n’avais pas vraiment prévu d’y aller. Mais dans un recoin de ma tête, cela faisait partie de mes projets futurs quand j’aurais le niveau, quand je me serais testé sur des kilométrages qui dépassent les 25km.
Si vous comptez lire un récit de course haletant, comme j’en ai lu beaucoup depuis dimanche, passez votre chemin. Je n’ai pas couru les 75 km. Si, par contre, vous êtes, comme moi, un débutant curieux d’approcher le mythe, restez là. Vous lirez ensuite le merveilleux compte-rendu de Benoit Cori, jeune basque amateur de bière qui a gagné, à la surprise générale, cette course avec un temps hallucinant de 5h32 (un moyenne de 13,7 km/h sur une course aussi technique qu’éprouvante). Oui il faut lire la belle histoire de Benoit, le trailer qui prie le Dieu de la Bière.
En attendant, qu’est-ce que je fichais là ?
Revenons en arrière. Il y a un peu plus d’un mois, Alexandra, une de mes camarades d’entrainement d’Urban Running, décide d’organiser ce qui, au départ, devait être une équipe féminine de relais à 4 pour la Sainté. De désaffection en abandon, l’équipe devient mixte. Elle me propose le poste de 4ème relayeur. J’hésite. Oui, oui, j’ai hésité. Pendant à peu près 1 seconde 3/4. C’est vrai. Quoi de mieux pour découvrir l’ambiance réputée particulière de cette course qu’un petit relais ? Qui plus est un an avant l’intention de la faire dans son intégralité. Et puis gambader la nuit dans la neige, j’adore ça. Et cela donne, au pire, une occasion de passer un week-end sympa à Lyon avec des potes. Vendu.
Niveau préparation, pas grand chose à dire. Si ce n’est que j’y suis vraiment allé en « touriste ». Mes problèmes de périostite m’ont de toute façon empêché de courir pendant deux semaines avant. Et je n’ai annulé qu’une seule course sur mon planning chargé du trimestre. Donc on part, sans aucune autre intention que de participer à une fête. Notre équipe est baptisée «Les Meufs», même si au départ, il ne reste qu’Alexandra dans les féminines. Les autres «meufs» sont donc Bruno «Chiken Run», Eric et moi-même. A côté de cette équipe, il y a l’équipe relais 3 de nos champions made in Urban Running : Narcisse, Stephan et Nico. Ce dernier sera forfait une semaine avant et remplacé au pied levé par Olivier. Ajoutons à l’équipée les courageux Cyril et Olivier qui eux partent pour la solo.
St-Étienne, le grand hall
L’ambiance de la course vous prend au moment où vous mettez les pieds dans l’immense hall expo de Saint-Etienne. Il est un peu plus de 18h. Durant les heures qui vont suivre, plus de 12.000 personnes vont venir dans ce gros hangar. Et ce qui sera le plus remarquable c’est le calme. La concentration et la tension sont palpables. Nous installons notre «campement provisoire» dans la zone derrière les gradins. Dans l’obscurité.
On a beau être là en touriste, on se laisse envahir peu à peu par la pression. Je suis le premier relais. Les 16 premiers kilomètres. J’essaie de dormir sur un transat que Narcisse, premier relais de l’équipe à 3, a réussi à trouver. Tout le monde se prépare. On essaie nos frontale Petzl Nao achetées au village à Lyon, le matin même. Avant de se rendre compte que pour les charger en USB, il fallait d’abord connecter la batterie. Petit tour en mode panique au stand Petzl. Ouf, il leur reste un chargeur de téléphone pour mettre ma batterie en charge.
Je passe au moins 4 fois aux toilettes en 3 heures, avec à chaque fois une file d’attente qui ne diminue pas. Je me recouche. Regarde Facebook sur mon iPhone. Croise Alexis, encore un Urban Runner. Il fait la totale en groupe avec 3 amis. Je sors m’échauffer. Trop tôt. Il fait vraiment froid. J’ai sorti ma nouvelle tenue d’hiver : guêtres, collant de trail, maillot manches longues Wintertrail, bonnet, gants, buff, coupe-vent softshell. Une vraie pub pour la marque Raidlight. Sans oublier l’ingrédient acheté spécialement pour l’occasion : les chaines Yaktrax.
Il est finalement 23h25 quand nous rejoignons le départ. Narcisse choisit le deuxième sas. Il regrettera de ne pas avoir pris le premier. Vu son niveau, il va avoir besoin de se dégager pour faire une bonne perf. Moi je n’en suis pas là. J’espère juste ne pas être trop gêné sur la partie roulante sur bitume. Je sais qu’il faut se dégager avant le chemin, étroit et probablement gelé. Sinon gare aux bouchons. C’est ma seule stratégie.
Il y a des hola, des hommages à des figures emblématiques de la course récemment disparus, de la musique techno à fond. On nous demande d’allumer les frontales, inutile en ville. C’est pour faire une belle image vidéo du départ. Un tube de U2 résonne. Je suis déçu de ne pas avoir du Vangelis. En plus, je déteste U2. Mais à ce moment, tout devient vite secondaire. C’est parti. On met un pied dans la légende à minuit pile.
Il fait bien sur froid mais le temps est particulièrement clément. Pas de neige comme certaines autres années. La neige nous attend par terre mais pas tout de suite.
Du bitume au verglas
Le roadbook disait que les 7 premiers kilomètres étaient de la route relativement plate. Narcisse disparait au loin devant moi. Avec toutes les séances de VMA que l’on fait sur la même piste, j’ai pris l’habitude de le voir de dos. Je me suis fixé un mini plan. Je cours les 7 premiers km comme un 10K. Je marcherai dans le chemin. La première erreur est due au manque d’échauffement. Je suis à 12,5 km/h de moyenne avec des pointes à 14. Hey ho, VMA de 15 mec !!! Tu te laisses entrainer. Tu vas finir dans le rouge. Le problème c’est que le bitume ne s’arrête pas à 7km. Je n’ai pas tout lu sur le roadbook. La montée de Sorbiers est encore du bitume mais on attaque le dénivelé positif. Et comme un abruti, j’en suis à me dire pas question de marcher tant que je suis sur la route. En trail, on marche sur les sentiers. Je suis en train de me cramer. Je finirais par m’arrêter une minute. La honte.
Au bout de quasiment 9 km, le chemin est là. Et il est bien blanc. Le côté du sentier est déjà rempli de gens qui chaussent les chaines. Ca me fait penser à ces touristes dans les routes de montagne l’hiver. Ceux qui mettent les chaines sur leur roue à la moindre trace de neige sur la chaussée. Je fais quelques mètres en courant pour jauger le potentiel glissant. Bon je vais tester mes Yaktrax pour la première fois de ma vie. Vu le nombre de chute que je cumule en trail, je vais essayer d’épargner ma GoPro toute neuve en tombant. Sans parler de ma cheville en cristal.
C’est un régal de courir avec ces chaines. Les descentes passent toutes seules. Ca accroche aussi bien sur la neige dure que le verglas. Je viens de comprendre que mon éternel problème de descente technique est psychologique. Là je me sens sécurisé. Bizarre pour quelqu’un qui n’a jamais eu peur de la pente en ski ou en snowboard.
La partie route est vite oubliée. C’est fun. Bien sur, je n’ai que 7 km à faire comme cela et suis au milieu de gens qui vont passer la nuit à morfler. Je sens bien que je suis le touriste. La caméra n’arrange surement pas l’image.
Le chemin devient plus praticable et le bitume revient assez longtemps pour que je fasse une autre erreur. J’enlève les chaines. Deux minutes après, je suis de nouveau sur le verglas. Le 13ème kilomètre. J’apprendrai plus tard qu’il y a eu beaucoup de casse de poignet ou de chevilles à cet endroit. Le sentier est trop étroit pour la foule. Plusieurs milliers de personnes doivent passer par là. Tant pis, je trouve un petit coin et m’arrête pour remettre les chaines. J’en profite pour essayer d’appeler Alexandra et lui signaler que je n’ai plus que 3 km. Mon iPhone n’a presque plus de batterie. Probablement à cause du froid. J’envoie un SMS. Qu’elle ne recevra pas. J’ai perdu un temps fou et probablement beaucoup de places. C’est toujours la même histoire. Je suis là en ballade améliorée mais la compétition me rappelle à l’ordre. Mais la cohue bancale empêche d’accélérer. Sur toute la partie « chemin », je suis sur une petite moyenne de 6,5 km/h. Les arrêts, les ralentissements pour filmer, la mauvaise gestion des chaines, la foule … j’ai plein de mauvaises excuses. Mais on n’était pas là pour le chrono.
St-Christo en Jarez (km16)
Quand les lumières du ravitaillement de Saint-Christo-en-Jarez se rapprochent, je me sens en pleine forme. Malheureusement, cela annonce surtout la fin de ma partie.
J’arrive dans la foule des relayeurs qui crient des prénoms en espérant obtenir une réponse. L’avantage est qu’avec un prénom comme Jean-Guillaume, je repère vite celle qui m’appelle. Alex’ est toujours aussi enthousiaste.
On fait une video souvenir du passage de la ceinture témoin et elle s’élance. On est tellement dans l’ambiance que j’écoute à peine ses recommandations pour retrouver sa voiture. Cela me prendra une heure de la trouver dans le charmant petit village de Saint-Christo. Une heure à greloter, parcourir toutes les rues, sans enlever quoi que ce soit, même pas les Yaktrax qui font clang-clang sur le bitume. Quand enfin je trouve la voiture, je me mets au chaud. Rien que le geste de me baisser pour enlever mes chaussures me déclenche une double crampe aux mollets. Le froid bien sur. L’hydratation peut-être. Je n’ai quasiment pas touché à ma réserve d’eau. Ces crampes sont les seuls choses qui me rappellent que j’ai fait un truc vaguement sportif entre minuit et 1h52. L’autre sensation c’est la frustration de n’avoir eu que ces pauvres 16 km à faire.
Depuis que je suis arrivé, la belle guirlande des frontales ne s’est toujours pas arrêté de descendre. C’est ça la magie de la «Sainté». Je me dis que si je n’avais pas eu à ramener la voiture à Lyon, j’aurais pu accompagner Alexandra pour boucler les 30 km. Quelle idée !!!
Lyon, Gerland
Je n’ai plus qu’à retourner à Lyon attendre mes camarades et assister à toutes les arrivées : celle de la Saintexpress (les 45 derniers kilomètres), celle des premiers relayeurs, celle de Benoit Cori, ce vainqueur surprise en 5h32. Celle de Maud Gobert, première féminine habituée des podiums de l’épreuve. Je croise aussi Bastien du blog Djailla qui vient de terminer la Saintexpress. Plus tard ce sera deux autres membres éminents de la Runnosphère : Greg Runner et Julien «Mangeur de cailloux», tous deux finishers d’argent du 75km en 8h15/8h17. Très très belle performance.
Narcisse et Alexandra, tous deux rapatriés du 30ème km en navette, arrivent. Je m’assoupis sur un gradin. Notre dernier coéquipier, Eric, arrive à 9h10. 65ème/231 sur le classement des équipes mixtes du relais à 4. Pas trop mal pour des touristes.
Et si on demande à toute la bande ce qu’ils pensent de la Saintélyon, on a tous envie d’y revenir. Mais ce sera la totale, un relais à 2, la Saintexpress ou rien. Plus de petite distance. Trop frustrant.
Cyril, un de nos deux solistes, arrivent après son abandon au 42ème km, à St Genoux. Son genou n’a pas tenu. Quelle ironie !!! On le savait éprouvé depuis les Templiers qu’il avait brillamment fini. Olivier, lui qui manquait d’entrainement ces derniers temps, sera notre finisher du jour. En 14h. Au mental. Secrètement on l’envie tous un peu.
J’ai beau me dire qu’il y a décidément trop de bitume dans cette course, la Saintélyon reste une course mythique et en être «finisher» est une aventure qui fait rêver les runneurs fous. En tout cas, si vous hésitez à tenter l’aventure parce que , comme moi, vous n’avez pas encore le niveau pour 45 ou 75 km, alors tentez un relais. A 3 pour éviter la frustration des deux premiers du relais 4, beaucoup trop courts.
Maintenant vous pouvez aller rêver en lisant la merveilleuse aventure du vainqueur de cette 60ème Sainté.
Allez il ne me reste plus qu’à monter ma petite vidéo «au coeur du peloton».
D’autres récits :
- Le même mais pour un relais à 3, par Olivier qui faisait partie de notre groupe d’Urban Runners.
- Jean-Pierre de Run Reporter Run faisait là sa première expérience trail. Il n’a pas oublié son inséparable GoPro pour nous faire un très beau reportage au coeur de l’action.
- La Saintélyon de la 3ème féminine Sylvaine Cussot
- Le récit des Lapins Runners, ce couple à grandes oreilles qui ne se séparent (presque) jamais sur les courses. Très belle leçon.
- Le récit super détaillé (préparation et avant-course comprises) de l’excellent Greg Runner, finisher d’argent en 8h17.
- La Saintexpress de Djailla
Sympa ce mini CR, néanmoins ça soulève une question de la course à pieds l’hiver et plus particulièrement quand le verglas et ou la neige s’invitent dans nos contrées. La coulée verte doit être une vraie patinoire, alors quel équipement pour ne pas « arrêter » la course durant la période justement où l’on engraisse le plus 😉
L’année dernière, on a couru tout l’hiver dans la coulée verte, même quand il neigeait. Je me rappelle d’une bonne séance de fractionné avec Philippe et Jean-Louis sur le terrain de rugby, dans la poudreuse. C’était fun. Les chaines et autres crampons c’est vraiment pour le verglas ou la neige dure. Sinon tu peux toujours acheter des chaussures spécial neige. Mais c’est comme les pneus neige, il faut habiter à la montagne pour rentabiliser l’achat.
Tu crois pas que tu vas t’en tirer comme ça 🙂
Sympa le récit du relais! Par contre, je ne sais pas comment tu as fait , mais je suis frustré pour toi. La prochaine, faudra venir au moins sur la SainteExpress, hein?! 😉
A très bientôt!
La prochaine fois, il y a des chances que je tente la totale.
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